lundi 27 mars 2017

Willys Interlagos: une Alpine au pays de la Samba !

Vous a-t-on déjà parlé rapidement de quelques Alpine A108 ou A110 fabriquées à l’étranger, il était donc temps pour moi de vous parler plus en détail de la version brésilienne de l’A108, répondant au doux nom de Willys-Overland Interlagos (du nom du fameux circuit brésilien).
 Pour bien comprendre comment l’A108 a pu se retrouver fabriquée près Sao Paulo à partir de 1961, il faut remonter le temps un peu plus loin, à la fin des années 50. La filiale brésilienne du constructeur américain Willys (célèbre pour ses Jeeps) se cantonne jusqu’alors dans sa spécialité, les véhicules tout-terrain, particulièrement adaptés aux routes défoncées du Brésil. Mais la direction locale sent bien que le développement du Brésil va créer un marché plus important pour les véhicules de tourisme destinés aux classes moyennes. Le projet de la nouvelle capitale Brasilia est validé depuis 1956, les villes brésiliennes se développent, et Willys-Overland veut sa berline moyenne, sans avoir vraiment les moyens de financer un nouveau véhicule !
 De son côté, la Régie Renault est désireuse de développer les ventes de sa Dauphine, sortie en 1956 en France, et particulièrement à l’export. Les droits de douane brésiliens rendant impossible la vente de Dauphine fabriquées en France, Renault cherche un partenaire. Et c’est ainsi que le 26 décembre 1958, Willys Overland recevait le feu vert de sa maison mère pour produire la Dauphine dans son usine de Sao Bernardo. Renault et Willys Inc débloquaient même 12 millions de dollars pour agrandir l’usine et installer une chaîne de production !
 La Dauphine en tant que telle sera produite de 1959 à 1965 (23 887 exemplaires) tandis que sa version Willys Gordini sera produite à partir de 1962 et jusqu’en 1968 (à 41 045 exemplaires). Mais tel n’est pas le sujet de cet article. Il fallait cependant planter le décor. Ce lien de partenariat industriel entre Willys Overland et Renault expliquant grandement l’arrivée de l’A108 devenue Interlagos sur les chaînes de Sao Bernardo.
 De l’autre côté de l’Atlantique, en France, Jean Rédélé cherche les moyens d’obtenir rapidement du cash pour continuer à développer sa petite affaire. Ses liens avec Renault sont forts, mais la marque au losange n’a pas encore pris le contrôle du petit constructeur. Rédélé a l’intuition qu’un moyen rapide d’obtenir du cash serait de proposer la production de ses modèles sous licence à l’étranger. Cela permettrait non seulement d’obtenir une redevance, mais aussi de vendre des pièces en plus gros volume, réduisant ainsi le goût global de ses propres voitures.
 Par l’entremise de Renault, Alpine va être mise en relation avec Willys Overland. Comme la marque brésilienne produit déjà la Dauphine, mettre en production l’Alpine A108 ne posera pas de vrais problèmes, et le réseau Willys pourrait les entretenir facilement. Du côté de Willys Overland, on y voit la possibilité de lancer la première sportive brésilienne (sans se douter qu’elle lancerait un mouvement rapidement suivi par DKW en 1965.
 L’accord est rapidement signé, et une petite chaîne (enfin très artisanale) est installée dans les nouveaux locaux de l’usine de Sao Bernardo. Au Brésil, l’A108 sera proposée en 3 versions différentes : Berlinette, Coupé (sur le modèle de l’A108 Coupé Sport) et Cabriolet (« Conversivel » en brésilien). Les premiers modèles tombent des chaînes dès 1961, et la Berlinette est présentée au Salon de Sao Paulo de cette même année. Les ambitions son grandes, puisque Willys prévoit de produire 8 voitures par jour. Objectif qui ne sera évidemment jamais atteint !
 La production durera jusqu’en 1966, n’atteignant que 822 exemplaires. Ce n’était pas un succès. Mais l’arrêt de la production (ou le fait de ne pas passer à l’A110) fut surtout dû à d’autres raisons : d’une part, le projet M, mené en collaboration avec les français de Renault coûtait beaucoup d’argent, dans une période de récession (ce projet, sur la base des travaux conduits en France pour donner naissance à la Renault 12, donnera un drôle d’avatar au Brésil, la Ford Corcel, lire aussi : Ford Corcel); d’autre part, les tractations entre Ford et Kaiser-Jeep, maison mère de Willys Overland, rendaient aléatoires tout autre projet de collaboration avec la marque française.
 L’Interlagos sera donc la seule Alpine produite au Brésil, mais aujourd’hui, elle est un modèle particulièrement recherché des amateurs, au point que Renault en présentait un exemplaire (rénové par Renault Classic) au dernier Salon Rétromobile. Si vous avez envie de rouler en Alpine, tout en cherchant l’exotisme, c’est sans doute vers le Brésil qu’il vous faudra regarder !










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